Dépenser plus pour gagner plus ?

Le président a parlé et, comme prévu (ici), n’a annoncé que quelques mesures destinées, par le biais d’un arrosage ciblé d’argent public, à réduire l’effet désastreux d’une fiscalité devenue excessive. Ce faisant, il a paré au plus pressé !

Il en découle deux observations :

– On ne sait pas pour l’instant qui va être le dindon de la farce de cette partie de bonneteau fiscal ; c’est à dire qui va payer cette dépense fiscale évaluée à 12 milliards € puisque l’Etat n’a que des dettes et n’a pas d’autre argent que celui qu’il vole par le biais des impôts ou qu’il emprunte sur les marchés ?

Cela veut dire qu’il n’y a que deux options : soit l’Etat va emprunter sur les marchés et creuser le déficit soit il va (probablement) augmenter les impôts pour certaines catégories de contribuables.

– Comme prévu, l’option de la réduction de la pression fiscale du fait d’une réduction de la dépense publique permettant de redonner du pouvoir d’achat par le biais de la diminution des impôts a été délibérément mise de côté.

Or, on sait que la solution à l’hyper fiscalité française est la diminution des dépenses publiques et notamment des frais de fonctionnement de l’Etat.

Néanmoins, les français, pour leur immense majorité, vivent toujours dans le mythe de l’Etat tout puissant, qui a de l’argent, (j’ai entendu : “du fric il y en a !”) et de la distribution de l’argent gratuit (tout le monde se souvient de la déclaration de F Hollande « ça ne coûte rien puisque c’est l’Etat qui paie ») alors que l’on sait depuis F Bastiat (1801-1850) que « L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde ».

Comme certaines enseignes de supermarchés qui essaient de faire croire dans leurs publicités que « plus on dépense plus on fait d’économies », l’opinion publique pense donc, alors que l’argent gratuit n’existe pas, que plus on dépense d’argent public … plus on va soi-même « gagner » d’argent ; preuve évidente que le socialisme a complètement intoxiqué la société française au sein de laquelle l’Etat conserve, quoiqu’il arrive, son rôle central de collecteur puis de redistributeur d’argent !

Manifestement, les gilets jaunes et autres, dont on peut aisément comprendre qu’il leur soit difficile de vivre avec 1.200 €/mois, estiment que le moyen le plus simple de résoudre leur problème de pouvoir d’achat est de se lancer dans la spirale inflationniste de la progression des salaires alors que le mauvais état de l’économie ne permet pas de gains de productivité, que la croissance est extrêmement faible et que l’inflation reste contenue à des niveaux très bas.

Ces mêmes français ne veulent en fait absolument pas d’une diminution du rôle de l’Etat (qui se mêle de tout et souvent en faisant n’importe quoi avec un coût induit désastreux) mais seulement d’une « réorientation de la politique fiscale » à leur profit ; notamment en s’en prenant aux « riches » qui bénéficieraient d’avantages indus et de cadeaux indécents, obtenus « sur le dos du peuple ».

Ce faisant, c’est le vieux couplet sur les inégalités qui ressort et ils expriment donc un sentiment d’injustice qu’ils souhaitent voir compensé par la spoliation d’autres contribuables en espérant qu’ils en retireront eux-mêmes un bénéfice indirect.

Seulement, l’égalitarisme est une illusion et une hérésie et s’attaquer aux riches (comprendre les gens qui en ont plus que soi) est une mauvaise idée surtout que dans cette catégorie figurent les petits patrons et les petits commerçants dont les revenus sont bien souvent très inférieurs à ceux payés, par nos impôts, aux fonctionnaires des catégories A et supérieures. Il existe à Bercy, à l’assemblée nationale et au sénat notamment, des fonctionnaires qui gagnent discrètement entre 10.000 et 20.000 € par mois, primes en sus ! Voir (ici) et (là).

Or, cette vérité là est complètement occultée alors que les petits patrons et petits commerçants ont été laissés pour compte dans l’affaire mais devront subir, lorsqu’ils sont employeurs, une nouvelle pression à la baisse sur leurs marges.

E Macron a pour l’instant résisté à la tentation de rétablir l’ISF ; mais il faut quand même rappeler que supprimer un impôt n’est pas un cadeau mais seulement une diminution du vol étatique ; puisque l’impôt n’est qu’un vol légalisé !

Par ailleurs, un pays ne s’est jamais appauvri d’avoir « trop de riches » mais il s’est bien appauvri de voir ses riches partir à l’étranger pour échapper à la spoliation fiscale ; et c’est cet exode fiscal de Macron a tenté d’enrayer, sans succès pour l’instant !

Par ailleurs, l’effort de solidarité tant demandé par les gilets jaunes et auquel les riches échapperaient (comme si ceux-ci ne payaient aucun impôt) passe complètement à coté de cette question fondamentale : quel effort de solidarité l’Etat fait-il lui-même ?

En effet, le débat apparaît complètement faussé puisque, en l’occurrence,  l’Etat se place au dessus de la mêlée, en censeur moralisateur, redistributeur de richesse mais continue en fait à dépenser à tort et à travers, dans une gabegie insensée, l’argent des français.

L’Etat apparaît donc être la première cause des difficultés des français !

Or, E Macron n’a, à aucun moment de son intervention, exprimé l’intention de résoudre les problèmes structurels du pays liés au coût de fonctionnement de l’Etat ; ce que l’on peut résumer par l’aphorisme suivant : L’austérité pour les français moyens certainement, pour l’Etat sûrement pas !

Il apparaît donc évident que le but poursuivi par E Macron est seulement de gagner du temps en faisant ce que les politiciens font de « mieux » (de pire en fait) : dépenser l’argent qu’on n’a pas pour (r)acheter la paix sociale en désamorçant la grogne populaire tout en menaçant avec insistance les « fauteurs de troubles » !

La vieille recette de la carotte et du bâton !

Il n’a pas non plus évoqué le sort de la fiscalité écologique dont on sait pourtant qu’il s’agit essentiellement d’une transition fiscale (ici). Mais, comme il a clairement annoncé que la « lutte contre le réchauffement climatique » devait continuer, il faut donc en conclure qu’elle sera remise en œuvre dès que les esprits se seront calmés. L’augmentation fiscale du prix de l’énergie continuera donc !

Néanmoins, les réactions entendues font plutôt apparaître une insatisfaction quant au montant des distributions, jugées insuffisantes, alors que les partis extrémistes (LFI et autres) et certains syndicats institutionnels tentent de récupérer le train de la contestation populaire et n’hésitent pas à remettre de l’huile sur le feu !

Il n’est donc pas sûr que ces distributions d’argent gratuit soient de nature à faire cesser la révolte.

Seulement, c’est ignorer le principe fondamental rappelé par Margaret Thatcher selon lequel « le socialisme s’arrête avec la fin de l’argent des autres ! ».

Il n’est pas non plus inutile de préciser que cette politique de distribution de pouvoir d’achat (comprendre d’argent gratuit des autres), laquelle va probablement nous entraîner dans un déficit abyssal au-delà des 3% du PIB, est aussi celle voulue par le gouvernement italien et qu’elle a été rejetée par Bruxelles en raison des risques financiers qu’elle fait courir aux autres membres de la zone € !

Nous poursuivons donc notre course dans le cercle mortifère des déficits, de la dette et des impôts dont l’issue ne peut qu’être fatale alors que la réduction des dépenses publiques est la seule solution permettant de réduire les prélèvements fiscaux.

Or, sur ce dernier plan, il faut bien reconnaître que l’action d’E Macron, depuis son élection, est absolument inexistante !

Reste à savoir si cette « politique » sera viable au regard des besoins de financement de l’Etat (plus de 200 milliards € par an) et si les marchés ne vont pas nous faire payer notre laxisme budgétaire ; ce qui ne pourrait qu’aggraver la situation en provoquant une envolée de la dette, du chômage et un effondrement de la faible croissance qui nous reste.

Grâce à E Macron qui devait faire de la politique « autrement », la France est devenue un risque systémique au sein de l’UE ; au même titre que l’Italie.

Nous nous rapprochons malheureusement du précipice et venons de faire un grand pas en avant !

Bien cordialement à tous !

 

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A propos Dominique Philos

Navigateur, né en 1958, après un DEA de droit commercial de l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, je suis devenu Conseil Juridique, spécialisé en droit des affaires et fiscalité. L'Etat ayant décidé l'absorption des Conseils juridiques par les avocats, j'ai poursuivi mon activité en tant qu'avocat jusqu'à ce que je sois excédé par les difficultés mises à l'exercice de mon activité professionnelle. J'ai démissionné du Barreau en 1998 et partage désormais ma vie entre la France et la Grèce. Européen convaincu, je suis persuadé que le libéralisme est la seule option possible en matière économique.

8 réflexions sur « Dépenser plus pour gagner plus ? »

  1. Quoiqu’on en dise, Macron est l’aboutissement du processus collectiviste au profit d’une minorité au détriment de la majorité, on en est au « Tout par l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État ! » (Mussolini)

  2. Les français se sont progressivement englués dans l’assistanat (et son corolaire la dette) depuis 1968 et le septennat de Giscard qui suivant la doctrine de Jean Monnet, considérait que la France et son industrie était incapable de s’en sortir seul.
    Mitterrand et son esprit de jouissance et son logiciel des années 30 a accéléré le processus et la lâcheté ou la bêtise des suivants Chirac en tête nous conduisent à la situation actuelle : démagogie, gauchisme et assistanat à tous les étages.
    En 2017, nos brillants énarques considérant que les politiques bloquaient le processus d’intégration européenne de la France décident de s’affranchir de ces ringards en portant au pouvoir le meilleur d’entre eux : Macron, jeune, brillant…
    A peine élu, Macron y va à fond et se croit très malin de sortir ce crétin d’Hulot du chapeau pour justifier d’une fiscalité écologique confiscatoire propre à rendre nos finances publiques irréprochables au sens de Maastricht sans toucher à la dépense publique qui est la bombe à fragmentation française
    La suite vous la connaissez, flanqué d’un premier ministre digne du Juppé de 1995, il fait exploser la chaudière sociale
    Le problème est que la plupart des régions ne vivent que d’aides sociales, donc si vous réduisez la dépense publique vous enclenchez un processus d’émeutes dignes du 6 février 1934 appuyé par nos chères têtes blondes des banlieues
    Et là il faut tirer dans la foule pour reprendre le contrôle… c’est compliqué et Macron et ses sbires me paraissent peut taillés pour ce genre de sport
    Conséquence : on ne peut strictement rien faire et la solution viendra d’une crise financière internationale qui bloquera le crédit gratuit dont jouit la France ce qui précipitera le pays dans des troubles insurrectionnels
    Et là ce sera l’épreuve de vérité : soit Mélenchon/Chavez, soit Bolsonaro/une personne X qui sortira du chapeau à ce moment là et qui remettra de l’ordre avec force (Dupont-Aignan peut être, pas sûr)
    Je prend les paris : nous aurons un Bolsonaro français avant 10 ans

    1. Votre pari est probable

      Au fur et à mesure que nous nous rapprocherons de 2022, nous verrons des prétendants aux dents longues faire leur apparition en promettant bien entendu de sauver les français sans que cela leur coute quoi que ce soit …

      Et, dans ces moments d’exaltation électorale, les français sont particulièrement crédules !

      1. Il me semble que, sur la plate – forme de revendications de l’initiatrice de la pétition anti hausse des carburants dont je ne suis pas sûr de l’orthographe exacte (Priscillia LU….), la baisse du train de vie de l’état (salaires des ministres, des députés, de leurs indemnités, de leurs retraites, diminution du nbre de hauts fonctionnaires, suppression du Sénat, …) font partie des revendications. Je pense qu’une refonte du CICE qui sert dans beaucoup d’entreprises à améliorer les marges sans réels création d’emploi, gouvernement peut financer les mesures annoncées qui ne sont pas d’ailleurs encore très bien définies.

        1. Les GJ n’ayant pas de porte parole officiel, les revendications sont très diverses.

          Effectivement, pour une partie d’entre-eux votre observation est tout à fait exacte mais ce n’est pas la majorité des revendications entendues.

          Parmi eux, il y avait des petits patrons et artisans ce qui explique la chose.

          L’efficacité du CICE reste à ce jour controversée mais c’est toujours la même chose avec les usines à gaz inventées par Bercy. Il serait tellement plus simple de réduire l’imposition tout court mais ce serait retirer à nos technocrates un moyen de tout contrôler !

  3. Les Politiques continuent à dépenser sans compter , ils ne veulent pas réduire non seulement les privilèges mais les déficits . Trop de gabegie pas la peine de vous les rappeler.. Les économies ne se font pas ou il faut et elles se font au détriment des services régaliens nécessaires.
    J’en ai entendu des mensonges mais la France c’est une synthèse =
    Les Allemands ont perdu en 1945 sur le terrain. Mais avec l’Europe ils développent la même stratégie de conquête .. Ne soyons pas naïfs . La France n’a pas été à la hauteur elle a joué en seconde division pendant que l’Allemagne jouait les premiers rôles en 1ere dans l’industrie en tout particulier.
    La France souffre de son administration, du nombre d’élus, d’un système démocratique, d’un gouvernement et de ses collectivités territoriales gargantuesques au détriment des services Régaliens . Cela empêche le progrès et le développement économique , ceux qui créent sont étouffés par la massification de l’ETAT. Cette massification de l’ETAT guide le pays dans la haine, la jalousie de l’autre qui travaille dans l’économie mondiale et qui crée les richesses . L’ETAT est devenu une entreprise qui comme les Shadocks grignotent les Gibis . l’ETAT Français devrait aider les TPE-PME au développement économique mais il tue à petit feu ces TPE-PME en pensant s’enrichir et favorise les multinationales. Les Taxes et impôts sont devenus le chiffre d’affaire de l’ETAT Français et non une valeur de solidarité ..

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