Une République de coquins

La vie politique française est de plus en plus polluée par les affaires … lesquelles ne sont rien d’autre que la révélation de petits arrangements entre amis !

Nous avons eu droit, pendant les présidentielles, à l’affaire Fillon dite Penelope Gate, à l’affaire du FN pour des financements d’emplois fictifs par l’UE et cela continue avec le même motif pour le Modem et enfin une histoire de conflits d’intérêts avec l’affaire Ferrand ; ces deux dernières ayant poussé vers la sortie Bayrou et Ferrand.

Evidemment, l’accumulation de ces affaires rend l’atmosphère politique et publique délétère ; surtout que le monde politique est déjà très mal vu par la majorité des français … bien que les politiciens prétendent, bien au contraire, faire preuve de désintérêt et d’abnégation !

Tout le monde connaît la maxime de la République française : Liberté – Egalité – Fraternité et ses deux premiers mots figurent dans l’article 1 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ; laquelle figure en préambule de la Constitution de 1958 qui régit le fonctionnement institutionnel de la France en énonçant : « Tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits »

A propos de la Liberté : il s’agissait à l’époque avant tout de l’abrogation des droits féodaux et des avantages accordés à la noblesse et au clergé. La société française se trouvait réunifiée et n’était plus divisée en ordres à la valeur hiérarchique discutable.

A propos de l’égalité : cela veut dire que tous les hommes (et femmes) bénéficient des mêmes droits et doivent être traités de la même façon ; et que personne ne peut exciper de sa position sociale pour en tirer un avantage, quel qu’il soit, devant l’administration, la justice ou la police.

Evidemment, cette notion d’égalité n’a rien à voir avec l’égalistarisme prôné par les socialistes de tous poils ; lequel vise à créer une société « nouvelle » où tout le monde se trouverait au même niveau social sans pouvoir prétendre réussir par son seul talent, son travail ou ses qualités professionnelles.

Or, ayant été élevé à l’école de la République dans le mythe de cette maxime et j’ai découvert avec une certaine surprise, après être entré dans la vie professionnelle, qu’en fait les chances n’étaient pas les mêmes pour tous et qu’il fallait maîtriser certains codes, faire partie de certains réseaux et connaître certaines règles pour réussir !

Un exemple va vous éclairer : Je voulais devenir magistrat mais j’ai dû y renoncer car j’ai eu le sentiment, à tord ou à raison, que je n’y arriverais pas alors que je devais impérativement entrer dans la vie active.

Or, mon voisin a 3 enfants et tous … sont magistrats … ce ne peut pas être un hasard … même génétique …. C’est tout simplement que cette famille connaissait les codes et les méthodes pour que tous ses enfants deviennent magistrats.

Moi pas !

Evidemment, tout s’explique quand on sait que le père est avocat et prof à l’ENM (école nationale de la magistrature) !

Et en fait, on s’aperçoit que tout fonctionne ainsi car … tout est une question de réseaux et de relations familiales ou autres !

Ainsi, si vous prenez les élèves ayant réussi le concours de l’ENA, vous allez vous apercevoir qu’ils sont tous issus de la même catégorie socioprofessionnelle (enfants de fonctionnaires et souvent d’enseignants). Cela ne veut pas dire que les étudiants ayant réussi le concours n’ont eu aucun mérite mais cela veut dire qu’à mérite égal, ceux qui ont les codes et les réseaux réussissent et les autres … échouent !

Quelle conclusion en tirer ?

Qu’à l’école, tous les élèves (ou à peu près) ont le bac (ce qui n’était pas le cas en 1976) mais que celui-ci ne sert plus à rien ! Car si vous n’avez pas les codes, la famille pour vous financer et les réseaux, vous n’arriverez pas à grand-chose … sauf bien sûr si vous avez des qualités exceptionnelles (disons le tout net : si vous êtes, sans être un génie, largement au dessus des autres).

Et les progrès de la sociologie permettent aujourd’hui, dans une certaine mesure, en fonction de l’endroit où vous vivez et où vous allez à l’école maternelle, de vous prédire votre avenir sans avoir recours à la chiromancie !

L’école de la République, décrite par Marcel Pagnol, n’existe plus … il n’y a plus que des réseaux et des castes qui se surveillent et se contrôlent et plus vous montez dans la hiérarchie sociale, plus ce phénomène devient incontournable !

Là où je veux en venir, c’est que le milieu de la politique ne fait pas exception à cette règle … bien au contraire et que, s’il fallait faire la liste de tous les passe droit, tous les privilèges indus, tous les petits avantages, petits abus dont profitent nos élites, ce n’est pas un article qu’il faudrait écrire, c’est une bible avec le papier adapté !

Et si vous cherchez bien, vous verrez que ces réseaux sont partout !

Ainsi en est-il de la nomination au tour extérieur qui permet de nommer à un poste de fonctionnaire un ami, une relation, le membre d’un même réseau, un député battu, un membre de cabinet ministériel qui n’a pas réussi à se recaser dans une entreprise, sans que qu’il ait besoin de passer les concours ni même d’avoir les compétences requises !

Il ne s’agit, en l’occurrence, rien d’autre que l’émanation du fait du prince dans les mêmes conditions que lorsque celui-ci gracie un condamné …

La promotion résulte du seul bon vouloir du monarque ; ce qui est quand même un comble dans une république !

Quelques exemples vous éclaireront …

Vous connaissez le CESE (le conseil économique social et environnemental) de son ancien nom le conseil économique et social ? Il s’agit d’un machin coûteux qui ne sert … à rien sauf précisément à recaser des amis politiques dans des postes grassement rémunérés et pas trop prenants ! En ont bénéficié : JP Delevoye (politicien ump), Gérard d’Aboville (navigateur), Maud Fontenoy (navigatrice).

Thierry Rey, ancien compagnon de Claude Chirac (fille de l’ancien président), pour sa part, a été nommé à l’Inspection Générale de la jeunesse et des sports en remerciement de son soutien à F Hollande entre 2011 et 2012.

Léon Bertrand, ancien ministre, a été nommé par J Chirac Inspecteur général de l’Education Nationale.

Et ces nominations de complaisance vont jusqu’au Conseil d’Etat puisque Arno Klarsfeld y a été nommé alors qu’il n’avait pas les compétences nécessaires … mais les bonnes relations (Nicolas Sarkozy en l’occurrence !).

Et, bien souvent, si l’on en croit Philippe Tascot qui a écrit un livre édifiant sur le sujet (les pilleurs de la République), cela n’engage a rien celui qui en bénéficie ; même pas à exercer une activité réelle !

Et ce système de réseaux s’étend partout puisque ces pratiques recouvrent tous les domaines de la vie car vos relations peuvent même vous faire bénéficier par priorité d’un logement social (à loyer modéré) dans les beaux quartiers de Paris …

Nous passerons brièvement sur les emplois fictifs de l’Etat (préfets hors cadre ou ambassadeurs sans affectation mais aussi près de 50.000 enseignants sans poste) ainsi que sur les attributions de marchés publics à des entreprises privées dans le cadre de ce qu’on appelle le capitalisme de connivence (à charge évidemment de renvoyer l’ascenseur) !

Evidemment, il y a parfois des petits dérapages … On se souvient de la Mutuelle Nationale des Etudiants de France (MNEF) contrôlée par les militants de l’UNEF (trotskystes) et qui a fini en faillite avant d’être transformée en La Mutuelle des Etudiants (LMDE) en l’an 2000 ; avec quelques péripéties de gestion ayant tout de même valu des ennuis judiciaires pour MM Cambadelis (condamné à six mois avec sursis) et Strauss-Kahn (obligé de démissionner de son poste de Ministre).

Mais, finalement, tout ce petit monde s’en sort plutôt bien car avez-vous déjà vu un député battu devenir chômeur ?

Evidemment, vous allez faire le constat que vous n’avez pas droit à ces petits avantages et que vous trouvez ça injuste ?

C’est tout simplement que vous n’êtes pas dans l’orbite du pouvoir plus exactement dans le bon cercle ! (syndical, politique, syndicat étudiant, cercle d’influences et de réseau) car la France dite Républicaine fonctionne ainsi !

Alexandre Soljenitsyne l’avait décrit dans « le 1er cercle », un livre remarquable sur le pouvoir et son organisation.

Le constat est simple : Plus vous vous éloignez du 1er cercle (autour du pouvoir) et moins vous avez de chances de réussir car le mérite n’est souvent qu’un habillage pour masquer une certaine réalité souvent moins glorieuse !

Le problème est que tous ces petits accommodements ont, bien évidemment, un coût pour la collectivité et que ce coût est forcément payé par quelqu’un !

Vous et moi en l’occurrence !

Alors, on nous promet une nouvelle loi de moralisation de la vie politique et que, ce coup-ci, tout va changer !

Une fois de plus !

Il s’agit essentiellement de la poudre aux yeux ou d’un écran de fumée pour aveugler l’électeur … car, en fait, tous les membres de ces réseaux ne souhaitent nullement qu’il y ait réellement un contrôle et des sanctions car ce serait pour eux se tirer une balle dans le pied !

En fait, cela ne sera qu’une loi de plus et cela ne changera rien car, le fond du problème est que la vie politique est contrôlée par les fonctionnaires qui, comme par hasard, sont aussi les politiciens qui sont dans les cabinets ministériels ou qui sont ministres voire même députés et votent les lois !

Et, le plus fort, c’est que les politiciens et hauts fonctionnaires s’autorisent avec l’argent public, nos impôts, ce que les entreprises n’ont pas le droit de faire avec leur propre argent !

Nous nous trouvons donc devant un système qui fonctionne en auto contrôle et permet à des fonctionnaires parlementaires largement surreprésentés dans les deux chambres du Parlement d’avoir la main sur la souveraineté de l’Etat, ses administrations et la direction des collectivités territoriales, alors qu’ils sont juridiquement les subordonnés des personnes morales dont ils ont indirectement et politiquement pris le contrôle!

Cela s’appelle un conflit d’intérêts !

Churchill disait que « la démocratie était le pire de tous les régimes politiques à l’exclusion de tous les autres » !

Certes, mais ici nous nous trouvons en présence d’un système verrouillé avec trop d’État, trop d’administrations, trop de règlementation, trop de contrôles, trop de monopoles, trop de privilèges, trop de laxisme, trop de corruption car, bien évidemment, c’est l’emprise excessive de l’Etat qui permet tous ces petits arrangements !

Et tout ça n’a rien à voir avec la démocratie !

Le développement des réseaux, d’Internet et des passerelles d’information cours-circuitant les systèmes traditionnels d’information plus ou moins contrôlés par l’Etat permet certes de divulguer certains de ces petits arrangements entre amis qui relèvent bien souvent du marché de coquins et parfois de la justice pénale mais il ne faut pas être dupe car ce que vous voyez n’est que la partie émergée de l’iceberg !

Un grand pas vers la moralisation de la vie politique serait l’interdiction des nominations discrétionnaires au tour extérieur ainsi que d’une part la démission obligatoire des fonctionnaires élus et d’autre part l’interdiction du pantouflage et des allers-retours entre les grands corps l’Etat tels l’inspection des finances, la Cour des comptes, le Conseil d’Etat, etc … et les entreprises privées ; avec tous les conflits d’intérêt qui en découlent !

Quant à la diminution du poids de l‘Etat … rien ne semble indiquer qu’il puisse en être question !

Bien cordialement

 

Απο την Ελλαδα (de Grèce)

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A propos Dominique Philos

Navigateur, né en 1958, après un DEA de droit commercial de l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, je suis devenu Conseil Juridique, spécialisé en droit des affaires et fiscalité. L'Etat ayant décidé l'absorption des Conseils juridiques par les avocats, j'ai poursuivi mon activité en tant qu'avocat jusqu'à ce que je sois excédé par les difficultés mises à l'exercice de mon activité professionnelle. J'ai démissionné du Barreau en 1998 et partage désormais ma vie entre la France et la Grèce. Européen convaincu, je suis persuadé que le libéralisme est la seule option possible en matière économique.

4 réflexions sur « Une République de coquins »

  1. Cher Philo,Décidément vous avez l’art de la phrase qui tape hélas juste .Je ne sais votre parcours mais votre désillusion ne peut souffrir aucune critique tant elle transparaît la réalité sordide du Pouvoir ,quel qu’il soit et malheureusement en tous lieux . La faute a qui? Pas aux Zelus mais à ces imbéciles auxquels on demande d’émettre un bulletin dans une urne La démocratie du 21 émeutes siècle est un l’Eurre . En Grece antique ou même à Rome les électeurs n’étaient pas la plèbe ignare actuelle . Imaginez la ou le pauvre bougre avec le QI d’un singe à le même poids que vous ! Ainsi leur nombre étant évidement bien plus important , ces piliers de comptoir décident en réalité et en fait .

  2. Quand il y a de l’argent et du pouvoir , en France certains , trop nombreux sont prêts à changer de religion. Mais ils sont souvent malheureux car ils ne possèdent que l’argent.

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