France : Des risques futurs incontrôlables

Nous avons examiné, dans un précédent article, les moyens utilisés par le gouvernement pour financer l’économie pendant et après le confinement décidé à la suite de l’épidémie de Covid.

Nous poursuivons notre prospective, en examinant les risques liés aux options du gouvernement.

Un pays plombé

La France n’était déjà pas un pays libéral (sur le plan économique) avant l’épidémie avec une dépense publique s’élevant à 57% du PIB. La situation devrait fatalement s’aggraver en passant à 75% en 2020 … et il n’est même pas sûr que ce gonflement excessif du poids de l’Etat dans l’économie ne soit que temporaire

Nous sommes passés, dans les faits, à une économie complètement administrée sous la tutelle pesante d’une administration qui n’obéit pas à des règles économiques mais à des contingences politiques et/ou hiérarchiques !

On peut donc nourrir quelques doutes quant à l’évolution des choses du fait d’un système étatisé lourd, peu réactif et peu compétitif surtout vis-à-vis des autres pays de l’Union Européenne avec lesquels nous avons l’essentiel de nos échanges.

Il faut plutôt s’attendre à une forte dérive économique du fait de la perte de capital productif et humain sous la férule d’une administration omniprésente.

Une croissance impossible

Le président Macron a assuré, lors de sa dernière intervention du 14 juin, qu’il n’y aurait pas de hausse d’impôts et qu’on allait faire face aux dépenses grâce à une réindustrialisation plus verte, plus indépendante et plus solidaire.

Le problème est que cette affirmation, qui tient essentiellement de la récupération politicienne de sujets sociétaux, n’est pas crédible car la situation n’est pas tenable sur la durée. On ne relance pas la croissance par des incantations ou d’un simple claquement de doigts, ni même en arrosant l’économie d’argent fraichement imprimé.

E Macron semble ignorer que la condition essentielle, pour qu’il y ait un fonctionnement correct de l’économie, est qu’il doit y avoir des producteurs de biens ou de services et des consommateurs et surtout qu’il y ait une rencontre entre les uns et les autres et que les consommateurs soient intéressés par les biens et services qui leur sont proposés et soient prêts à les acheter !

Pour qu’il y ait réindustrialisation, il faut donc des conditions économiques favorables pour que des entrepreneurs acceptent d’investir et de prendre des risques en vue de produire en France et d’y gagner de l’argent. On n’investit pas pour en perdre !

Sait-on pourquoi l’industrie du médicament a pratiquement totalement délocalisé ?

Oui, mais il ne faut pas le dire ! c’est uniquement parce que l’Etat fonctionnaire, dans le but de contrôler/comprimer des dépenses de santé structurellement gravement déficitaires, a tellement réduit le prix de vente (règlementé) des médicaments qu’il n’y avait aucun intérêt pour un industriel à produire en France compte tenu des couts de production (salaires, charges et fiscalité).

Dans un cadre défavorable sur lequel il ne pouvait pas agir, l’industriel a donc décidé de transférer son activité là où il peut continuer à travailler et faire des bénéfices … ce qui prouve de manière péremptoire que l’Etat fonctionnaire ne comprend rien à l’économie et à l’industrie !

La délocalisation n’a donc rien à voir avec l’ultralibéralisme capitaliste mais bien tout à voir avec des décisions de l’administration d’Etat qui ont eu pour effet principal de dégrader la compétitivité des entreprises françaises !

Or, les entreprises existantes, malgré les aides ou les prêts, confrontées à la chute de leur activité vont devoir réduire leurs charges et donc l’emploi ; d’autant plus que l’Etat ne pourra pas compenser indéfiniment les pertes.

Et il est tout aussi vain de croire que toutes les petits entrepreneurs qui, emportés par la vague du confinement, auront disparu et tout perdu, vont recréer une entreprise et embaucher du personnel.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on en revient toujours aux handicaps bien connus : un poids excessif de la fiscalité (en rapport avec le poids de l’Etat et un secteur public surdimensionné), une faiblesse du taux d’emploi masquée par une redistribution très élevée destinée à compenser une pénurie chronique d’emplois, une lourdeur des charges sociales, une rigidité du marché du travail et une précocité de l’âge de départ en retraite.

Un lyrisme hors de propos

La réalité va fatalement rattraper les envolées lyriques du président et cette réalité est celle d’une dégradation profonde et durable des finances publiques, d’une économie sur le déclin gravement handicapée, dans un contexte de croissance mondiale faible ou nulle pour les prochaines années ; même si nous assisterons à un phénomène de rattrapage mécanique partiel de la croissance (le confinement aura simplement provoqué un décalage de la consommation de certains biens ou de certains investissements).

Il faut donc sans doute comprendre qu’il n’y aura pas de hausse d’impôts … jusqu’aux élections de 2022 mais qu’il faut s’attendre à une rafale d’impôts en 2023. La réalité incontournable est que les leviers d’action de l’Etat fonctionnaire sont la réduction des dépenses, la croissance, la dette et l’impôt et que, après avoir refusé la première, sans croissance et après avoir épuisé la dette, il n’y aura plus aucune autre marge de manœuvre hormis les impôts et cette situation est juste la conséquence de 45 ans de laxisme budgétaire et du refus constant des réformes ayant pour but de diminuer la dépense publique et l’endettement.

La situation financière de la France dépend désormais pour une grande part (tout comme l’Italie) du financement apporté par la BCE dans le cadre d’une émission monétaire massive comprimant les taux d’intérêts à zéro car elle est totalement incapable, avec ses seules recettes fiscales, de faire face à ses dépenses et à ses dettes.

Le pays est désormais dans la situation du malade alité à l’hôpital qui attend son traitement en espérant survivre encore un peu.

Le problème de la course à la dette et à l’émission monétaire massive, c’est qu’on ne peut que très difficilement en apprécier les effets et en maitriser les couts à long terme et qu’elle ne peut se terminer que dans le précipice car, en accumulant toujours plus de dettes malgré des recettes fiscales en baisse, il n’y a qu’une issue : le défaut c’est à dire l’incapacité du pays de faire face à ses engagements.

Et le défaut se termine toujours par une annulation des dettes et la ruine de tous les épargnants puisque les principaux créanciers de l’Etat sont les nationaux de cet Etat !

C’est tout simplement à la fois mécanique et inéluctable et l’exemple récent du Liban en est la plus évidente manifestation !

Bien cordialement à tous

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A propos Dominique Philos

Navigateur, né en 1958, après un DEA de droit commercial de l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, je suis devenu Conseil Juridique, spécialisé en droit des affaires et fiscalité. L'Etat ayant décidé l'absorption des Conseils juridiques par les avocats, j'ai poursuivi mon activité en tant qu'avocat jusqu'à ce que je sois excédé par les difficultés mises à l'exercice de mon activité professionnelle. J'ai démissionné du Barreau en 1998 et partage désormais ma vie entre la France et la Grèce. Européen convaincu, je suis persuadé que le libéralisme est la seule option possible en matière économique.

4 réflexions sur « France : Des risques futurs incontrôlables »

  1. Pas de hausses d’impôts ? Séance chez le coiffeur ce matin : 30 euros contre 26 il y a six mois. Bon il fallait financer les sprays désinfectants de l’employée angoissée par la peur d’un virus.

    Prolongation de 8 ans de la CRDS, impôt sur les succession pour les ayants droit des morts du covid, kilo de cerises à 10 euros qui moisissent sur les étagères faute de clients pour se les payer, j’en passe et des meilleures. C’était bien la peine de chialer pour qu’on trouve des gens pour les ramasser.

    Ca va forcément bien se passer comme dirait l’homme au masque.

  2. Et pendant ce temps-là l’état continue de gaspiller tous azimuts, le Louvre a ainsi acquis dernièrement par préemption un dessin de Simon Vouet représentant le cardinal Mazarin pour la modique somme de 206000 euros. La France ne pouvait pas se passer de cette oeuvre… Une goutte d’eau certes dans le budget de l’état mais il y a beaucoup de petites gouttes d’eau, beaucoup trop même et les petits ruisseaux font les grandes rivières et les inondations déficitaires et gageons que le fameux cardinal était tout aussi détesté en son temps par le bon peuple que l’actuel président.

    Les années passent mais la mentalité des politiciens et des fonctionnaires petits ou grands ne change pas : dépenser toujours dépenser et aux contribuables de payer.

    Puisqu’on vous dit que c’est du service public, bande de béotiens qui ne comprenez rien à l’art. Oui, oui c’est cela messieurs les indispensables de l’ENA , je vous ferai juste remarquer qu’aux Etats-Unis, il y a des musées privés avec de grandes oeuvres et sans que cela coûte un centime aux contribuables. Une autre politique est possible !

  3. Hair cut en vue à tout les étages, peut-être très prochainement en fonction de la vitesse de propagation de la crise économique. Le Corona va mettre un coup d’accélérateur pour précipiter les pays cigales contre le mur de la faillite… C’est peut-être mieux ainsi plutôt que de prolonger les souffrances a travers les soins palliatifs des politiques monétaires…

  4. Macron, incantant : effets de la crise sanitaire disparaissez, disparaissez ! disparaissez vous dis-je ou je vais me fâcher, na !

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